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3/3 – Les acteurs du numérique au cœur des élections européennes

CONTEXTE

- Mai 2019

À la veille des élections européennes de 2019, Lighthouse Europe propose une série d’articles afin de comprendre le fonctionnement du Parlement européen et les enjeux de cette période électorale. La série se compose de trois articles, publiés chaque mercredi :

o  1/3 – Comment les députés européens sont-ils élus et quelles sont leurs fonctions ?

o  2/3 – Les groupes politiques européens au sein du Parlement

o  3/3 – Les groupes politiques européens au sein du Parlement

Le contexte sensible des élections européennes

Depuis les élections présidentielles américaines de 2016, il s’est avéré que la diffusion de fausses informations sur internet a influencé l’issue de plusieurs scrutins à travers le monde. Un compte Twitter piloté par une agence de propagande d’un État tiers a par exemple pu usurper l’identité d’un des bureaux d’un parti politique afin de diffuser de fausses informations. La majorité des électeurs est ainsi susceptible d’être touchée par ce type de messages au cours d’une campagne.

En 2016, la campagne du Brexit a été marquée par l’influence des fake news. Les techniques de désinformation ont été employées massivement par certains pour convaincre les citoyens britanniques de l’importance de quitter l’Union européenne (UE). Ainsi, les bénéfices d’une sortie de l’UE ont été maximisés tandis que les coûts du divorce ont été minimisés. Le suffrage a donc été instrumentalisé au profit des partisans du « Leave »  qui n’ont pas fournis aux Britanniques l’ensemble des informations nécessaire à une prise de décision éclairée.

 

L’ingérence de certaines puissances étrangères et la circulation d’informations erronées nuisent grandement à la démocratie. Les citoyens n’ont plus en leur possession les moyens indispensables à la compréhension des enjeux propres à chaque élection. Les décisions prises sont ainsi soumises à un déficit d’informations.

A l’ère du numérique, il est d’autant plus facile pour les détracteurs de répandre leurs informations. Elles circulent rapidement, n’ont aucune limite géographique et peuvent être publiées par tous. De plus, les services de publicité payants proposés par les réseaux sociaux accroissent l’impact des campagnes politiques via des algorithmes qui permettent de cibler certains publics. C’est parce que la publicité est personnalisée qu’elle permet de toucher précisément certaines personnes et donc d’être plus efficace.

 

Face aux menaces, les États ont engagé un débat relatif à la protection de l’intégrité des élections.  L’ensemble des parties prenantes doivent ainsi trouver un juste équilibre entre l’encadrement du partage d’informations et le respect de la liberté d’expression des citoyens, inhérente à la démocratie.

Le Code de bonnes pratiques contre la désinformation 

Dans le cadre de ces débats, les acteurs du numérique ont commencé à prendre des mesures et se sont engagés à travailler avec les institutions pour assurer l’intégrité des élections.

Le 26 septembre 2018, plusieurs acteurs du numérique se sont réunis pour lutter contre la désinformation via l’établissement d’un code de bonnes pratiques. Les signataires s’engagent à prendre les mesures nécessaires au respect de l’intégrité des élections européennes et nationales : transparence accrue en matière de publicité politique, suppression des faux comptes sur les réseaux sociaux, coopération renforcée avec les vérificateurs de faits, … On retrouve parmi les signataires des géants du numérique et des annonceurs publicitaires.

Pour assurer l’intégrité des élections au sein de l’Union européenne (UE) certaines entreprises ont également lancé, de leur propre initiative, des dispositifs visant à renforcer la fiabilité des plateformes et des informations qui y circulent en empêchant l’expansion des fake news, en supprimant les faux comptes et en accroissant la transparence des publicités politiques.

Crédits photos :  Pixabay

La loi française contre la manipulation de l’information

Au niveau national, la loi fake news a été promulguée le 22 décembre 2018. Elle vise à lutter contre les fausses informations, notamment via l’établissement de règles relatives à la transparence des plateformes concernant la diffusion de publicités politiques payantes. Ces publications sont désormais encadrées par la loi. L’identité des auteurs et les montants engagés doivent communiqués afin de lutter contre les tentatives de manipulation, en période électorale.

Concernant les fausses informations, le juge des référés peut être saisi pour se prononcer sur l’intention manifeste d’un auteur de manipuler l’opinion publique via sa publication.

 

En dehors des périodes électorales, les géants du numérique doivent coordonner leur action pour lutter contre la diffusion des fake news.

La mise en œuvre de cette législation est extrêmement récente et peut être complexe à l’image de la suspension d’une campagne du gouvernement français. #Ouijevote a été lancé par l’exécutif afin d’inciter les Français à prendre part aux élections européennes. Afin de respecter la loi contre la manipulation de l’information, le réseau social avait décidé, contrairement à d’autres plateformes, de s’opposer à la publication de l’ensemble des publicités à caractère politique. Twitter est finalement revenu sur sa décision en déclarant soutenir les campagnes « encourageant la participation électorale ».

L’implication des civic tech dans les élections 

Afin de renforcer la participation des citoyens aux décisions publiques et plus largement à la démocratie, certains acteurs se sont saisis des innovations technologiques. Des plateformes civic tech ont ainsi été créées dans le but de répondre à l’actuelle crise de la représentation et de recréer des liens entre citoyens et décideurs. Les différentes civic tech qui ont émergé permettent de consulter les citoyens sur un ensemble de sujets. La société civile peut ainsi participer à la prise de décision via les actions et campagnes réalisées aux niveaux local, national mais aussi européen par ces nouveaux acteurs du monde numérique.

En amont des élections européennes, certaines civic tech ont mis en place des consultations sur l’avenir de l’UE afin d’améliorer nos systèmes politiques actuels. L’association CIVICO Europa et la civic tech Make.org se sont ainsi réunies pour lancer une consultation paneuropéenne, WeEuropeans. Elle a pour vocation de recenser les principales volontés des citoyens puis de les transmettre aux décideurs européens. Ainsi, les décisions ne seraient plus imposées mais proposées par les citoyens qui se réapproprient les politiques et priorités européennes. A travers cette initiative, les citoyens de l’ensemble de l’UE étaient invités à répondre à une question : « Comment réinventer l’Europe concrètement ? ». Suite à la participation d’1,8 million de citoyens et 11,3 millions de votes, 10 propositions ressortent de cette consultation. CIVICO Europa et Make.org invitent les décideurs publiques à prendre en compte les résultats de cette consultation afin de replacer le citoyen au cœur des politiques européennes.

 

L’enjeu actuel des acteurs du numérique est donc de garantir, avec les acteurs publics, l’intégrité des  élections européennes et de fournir aux citoyens les clefs d’une prise de décision éclairée.

La série d’articles proposée par Lighthouse Europe touche à sa fin à quelques jours du scrutin. L’objectif de ces publications était d’apporter un éclairage sur le fonctionnement du Parlement européen et les enjeux qui entourent les élections européennes. Cette période électorale marquera un tournant dans la vie politique européenne puisque de nouveaux représentants du peuple seront élus, de nouveaux groupes politiques émergeront et de nouvelles alliances se formeront. Le renouvellement de la composition des institutions constitue une période charnière pour la définition des futurs enjeux et priorités politiques européens qui impacteront l’ensemble de nos sociétés pour les prochaines années.

Par Thara Safi Couplet

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